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Les "psys" vent debout contre un projet de décret

Les "psys" vent debout contre un projet de décret

Catherine Petitnicolas 07/07/2008 in LE FIGARO

 

Les professionnels ont critiqué, samedi et dimanche, le nouveau texte destiné à réguler l'exercice de la profession de psychothérapeute. Ils redoutent l'instauration d'une formation sous-qualifiée.

Que faire face au casse-tête des décrets d'application de la loi du 9 août 2004 sur l'exercice de la psychothérapie, attendus depuis près de quatre ans et maintes fois repoussés ?

À l'origine, le député UMP Bernard Accoyer souhaitait "éviter certaines dérives sectaires" en réglementant l'accès à cette nébuleuse de spécialités pas toujours validées scientifiquement. Si l'intention était louable, le texte a suscité une levée de boucliers de la part des psychologues, des psychiatres et des psychanalystes.

Ce sujet crucial et lourd de répercussions non seulement pour la "planète psy", mais aussi pour l'ensemble de la société qui consulte de plus en plus souvent ces "praticiens de l'âme", a été longuement abordé lors des troisièmes Entretiens francophones de la psychologie qui viennent de se tenir à Paris, du 3 au 5 juillet.

Aux dernières nouvelles, la publication d'un arrêté concocté par la commission nationale de l'enseignement supérieur et le ministère de la Santé serait imminente.

"Ces deux instances nous proposent une protection de très bas niveau, à savoir un niveau bac plus trois assorti de 400 heures de formation clinique et théorique en psychopathologie et cinq mois de stage en tout et pour tout", déplore Philippe Grosbois, psychologue à l'université catholique d'Angers et chargé de mission "psychothérapie" au sein de la Fédération française des psychologues et de psychologie (FFPP) qui redoute que le texte soit avalisé dans la torpeur du mois d'août.

"Un véritable camouflet"

En guise de comparaison, rappelons que, actuellement, un psychologue doit au minimum suivre un cursus théorique de cinq ans à l'université assorti de nombreux stages, et que les psychiatres, après leurs huit années de cursus médical, doivent se former durant quatre ans et bientôt cinq entre l'hôpital et les cours théoriques. Sans oublier un long passage sur le divan (analyse didactique) et la participation active à de nombreux séminaires pour devenir un praticien digne de ce nom, à qui une personne en souffrance pourra se fier et se confier.

"Ce projet d'arrêté ressemble furieusement à celui des très nombreuses officines privées de psychothérapie, à but lucratif, qui ont tout intérêt à obtenir la mise en place de cette formation a minima", redoute Philippe Grosbois. Une position partagée par de nombreux professionnels aguerris. "Ce texte est un véritable camouflet pour nous psychiatres, camouflet d'autant plus fort qu'il devrait être avalisé par le ministère de la Santé", lance le Dr François Kammerer, président de l'Association française de psychiatrie. "Ce qui manque à ce projet, c'est l'obligation d'une formation clinique et théorique suffisamment solide. Plus grave, les futurs psychothérapeutes risquent de faire preuve d'une absence totale de regard critique vis-à-vis de l'ensemble de la connaissance et des savoirs et d'être dépendants de l'institution qui les aura formés", poursuit-il.

Le Dr Thierry Jean, psychiatre et psychanalyste, représentant de l'Association lacanienne internationale, est lui aussi très réservé, d'abord pour des raisons liées à la mise en place d'une formation insuffisante. Et ensuite parce qu'il voit se profiler en arrière-plan de ce projet "l'influence grandissante d'instituts de formation privés qui se sont lancés dans ce juteux créneau tout en soulageant la trésorerie de l'État".

Les candidats psychothérapeutes qui font appel à ces formations doivent financer eux-mêmes leur cursus. Alors que l'université est le seul endroit qui dispense un enseignement gratuit et de qualité permettant la constitution d'une pensée critique garante d'une pratique ultérieure autonome.

"Je crains que de tels thérapeutes, qui n'auront pas acquis un niveau de réflexion personnelle suffisant, soient des appliquants ou de simples techniciens", met en garde le Dr Kammerer, qui a "le sentiment que les pouvoirs publics ont décidé de créer des postes de praticiens sous-qualifiés". Une critique reprise par la majorité des psychologues. "Le législateur prétend que ce texte protège le titre de psychothérapeute mais, en filigrane, on voit la délégation par l'État d'un certain nombre de tâches à des professionnels sous-qualifiés et donc moins bien rémunérés", conclut Philippe Grosbois. Cet arrêté ministériel signera-t-il "l'an I de l'ère des techno-psy" comme l'écrit, dans Le Point daté du 3 juillet, Jacques-Alain Miller, l'un des plus éminents psychanalystes français ?



10/07/2008
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